Le MAO de Turin, à l'occasion des Journées de la culture TOASEAN 2021, accueille l'exposition photographique d'Eva Rapoport Believe avec le corps en Asie du Sud-Est - promue par le Département de culture, politique et société de l'Université de Turin et par T.wai Turin World Affairs Institute - qui raconte, à travers une série de 20 images, cinq cas d'interactions physiques avec des mondes invisibles : le Jathilan, une danse-transe javanaise dans laquelle les artistes sont possédés par des esprits ancestraux qui leur permettent de manifester une étonnante invulnérabilité physique, Puja Pantai, une cérémonie annuelle organisée par les Mah Meri, un peuple autochtone de la péninsule malaise, pour apaiser les esprits de la mer, Thaipusam, un festival de la communauté hindoue tamoule en Malaisie, le Phuket Vegetarian Festival au cours duquel les médiums sont possédés par des esprits et percer leur visage avec divers objets, et le Sak Yant Wai Kru, une cérémonie annuelle tenue dans le centre de la Thaïlande, au cours de laquelle les porteurs de tatouages sacrés se réunissent pour recharger leur pouvoir.

La perspective de transformer la religion en une chose du passé, tracée par les Lumières européennes et maintenue pendant une grande partie du XXe siècle, ne s'est pas réalisée. L'Asie du Sud-Est nous offre de nombreuses manifestations éclatantes : dans les pays d'Asie de l'Est, diverses formes de croyances populaires et doctrinales, marginales ou reconnues par l'État, jouent un rôle important dans la politique, la culture et la vie quotidienne. Et si la sécularisation ne s'est pas révélée durable, même l'écrit, qui jouait également un rôle central dans la transmission des savoirs, est aujourd'hui bousculé par les nouvelles technologies, qui ont mis au premier plan des formes de communication purement visuelles. 

Dans ce contexte où l'objet des croyances religieuses et des diverses formes de mysticisme est une force invisible, les formes d'interaction avec ces forces sont au contraire extrêmement tangibles et se révèlent à travers les corps des médiums.

L'état de possession ou de transe permet aux médiums de repousser de plus en plus loin les limites de ce qu'un corps peut supporter : les piercings rituels et les automutilations laissent des traces profondes sur le corps des fidèles, et en même temps marquent (voire hantent) les souvenirs. de qui est témoin de ces phénomènes. Les dévots portent les marques de leur foi non seulement dans leur cœur mais aussi sur leur corps : crânes rasés, tatouages sacrés, cicatrices de piercings rituels.